Chaque jour, en France, des milliers de salariés prennent le volant dans le cadre de leur activité professionnelle. Et chaque jour, certains n’en reviennent pas. La route est devenue un lieu de travail à haut risque, où les accidents routiers représentent la première cause de mortalité liée au travail. Face à ce danger, chaque employeur est tenu, par la législation, de prévenir les risques, de former ses collaborateurs, et de mettre en place un plan de prévention clair. Ce n’est pas une option, c’est une obligation légale.
Mais comment transformer une contrainte en levier d’organisation ? Comment sensibiliser efficacement, impliquer les équipes, éviter le manque d’information, et réduire les coûts humains et sociaux ? Dans cet article, découvrez les solutions concrètes, les programmes, les outils, et les bonnes pratiques pour instaurer une vraie culture sécurité routière en entreprise. Car agir aujourd’hui, c’est sauver des vies demain.
Le risque routier : une réalité silencieuse mais omniprésente
Pourquoi le risque routier concerne toutes les entreprises
Le risque routier est présent dans toutes les activités professionnelles qui impliquent des déplacements réguliers, en zone urbaine comme en milieu rural. Ce danger ne dépend pas uniquement du secteur d’activité ou du type de véhicule utilisé. Il dépend aussi de la distance parcourue, de la fatigue accumulée, du stress au volant, ou encore des habitudes de téléphone au volant, d’oubli de la ceinture de sécurité, ou de vitesse excessive.
Les causes des accidents mortels sont souvent liées à des facteurs humains : alcool, somnolence, utilisation du téléphone, manque d’attention. Parfois à une mauvaise organisation, à une pression sur les délais, ou à une activité mal planifiée. Et dans tous les cas, l’employeur est tenu, par le Code du travail, de prévenir ces risques dans le cadre de sa politique de santé au travail.
📊 Tableau comparatif : Accident de trajet vs Accident de mission
Critère | Accident de trajet | Accident de mission |
---|---|---|
Définition | Survenu entre le domicile et le lieu de travail (ou entre deux lieux professionnels). | Survenu pendant un déplacement effectué dans le cadre des missions de l’entreprise. |
Responsabilité de l’employeur | Limitée – sauf faute caractérisée (ex : véhicule non entretenu fourni par l’entreprise). | Pleine responsabilité de l’employeur en matière de sécurité et de prévention. |
Prise en charge | Par la Sécurité sociale (accident du travail), mais pas de faute inexcusable possible. | Par la Sécurité sociale et ouverture à la faute inexcusable si négligence prouvée. |
Couverture assurance entreprise | Non concernée directement. | L’assurance flotte ou mission entreprise peut être mobilisée. |
Conséquences RH | Reconnu comme accident du travail, mais sans protection absolue de l’emploi. | Idem, mais la responsabilité de l’employeur peut être engagée plus fortement. |
Exemples typiques | Collision sur le trajet domicile-bureau / arrêt bus / covoiturage pro. | Déplacement chez un client / livraison / réunion externe. |
Prévention possible ? | Limitée mais encouragée (flexibilité horaire, télétravail, covoiturage). | Oui, avec un plan de prévention, une charte de conduite, une vérification des véhicules. |
Ce que dit la loi : obligations et responsabilités de l’employeur
La législation en matière de sécurité routière en entreprise s’appuie sur des textes clairs. L’obligation de l’employeur est formalisée dans le Code du travail, notamment à travers le document unique d’évaluation des risques (DUERP). Il s’agit de recenser tous les risques professionnels, y compris les risques routiers, de les évaluer, et de proposer un plan de prévention adapté.
Ce document, obligatoire dans toutes les entreprises, doit être mis à jour régulièrement, notamment en cas de changement dans les conditions de travail, dans l’organisation des déplacements, ou après un accident. Il sert de base pour construire une politique de sécurité crédible et concrète.
Face à un accident de la route survenu dans un cadre professionnel, un employeur qui n’a pas mis en œuvre les actions de prévention nécessaires peut être reconnu responsable. On parle alors de faute inexcusable, avec des effets juridiques et financiers très lourds.
Mettre en place une politique de sécurité routière en entreprise
Pas besoin d’avoir un chef de projet dédié pour agir. Mais il faut une démarche claire. La première étape consiste à évaluer le risque en analysant les types de trajets, les profils de salariés, les conditions de conduite, et les outils de suivi des véhicules existants.
Ensuite, il s’agit de bâtir un plan structuré, comprenant :
- Des mesures techniques : vérification des véhicules, installation de limiteurs de vitesse, suivi GPS, etc.
- Des règles internes : interdiction de l’usage du téléphone au volant, obligation de la ceinture de sécurité, limitation du nombre de kilomètres/jour.
- Une organisation optimisée : gestion des horaires pour limiter la fatigue, adaptation des délais de livraison, meilleure planification des tournées.
La mise en place d’une charte mobilité ou d’un guide de prévention permet de formaliser les engagements de chacun : direction, managers, salariés.

Former et sensibiliser pour changer durablement les comportements
On ne change pas les comportements par décret. Il faut former et sensibiliser en continu. La formation à la sécurité routière est un outil fondamental, qui doit être adapté à chaque public. Les programmes de formation peuvent inclure :
- Des modules de formation des salariés sur les risques routiers
- Des ateliers de prévention avec des simulateurs
- Des sessions de rappel des principes du code de la route
- Des formations sur les effets de l’alcool, les dangers de la vitesse, ou les bonnes pratiques en cas de maladie ou de fatigue
La sensibilisation à la sécurité passe aussi par des actions récurrentes. Les journées de la sécurité routière au travail, organisées en mai à l’initiative des pouvoirs publics, sont l’occasion de créer un moment fort. C’est le moment d’organiser une animation sécurité routière, un jeu pédagogique, ou une conférence avec un formateur expérimenté.
Ces journées peuvent être relayées par mail interne, communiquées sur l’intranet, ou faire l’objet d’une campagne d’affichage. L’important est de mobiliser les employés de manière intelligente, autour d’activités thématiques qui leur parlent.
Des ressources prêtes à l’emploi pour agir dès maintenant
Le contenu pédagogique et les outils de sensibilisation sont nombreux. Le site de la Sécurité routière propose un kit de sécurité employeur complet : affiches, vidéos, fiches pratiques, quizz interactifs, supports d’animation.
Certaines plateformes publiques diffusent aussi des ressources pour employeurs et des solutions innovantes : programmes en ligne, MOOC, guides sur les risques liés au trajet domicile-travail, ou sur les dangers des comportements à risque comme l’usage du téléphone ou la conduite sous l’effet de médicaments.
Il existe même des modèles de programmes de formation intégrés à la politique de santé sécurité globale de l’entreprise, avec indicateurs de suivi et tableaux de bord. La direction peut ainsi piloter les progrès réalisés en matière de prévention des accidents et d’engagement sécurité.
Sécurité routière en entreprise : transformer l’obligation en opportunité
Plus qu’une obligation réglementaire, la sécurité routière au travail est un enjeu stratégique. Elle touche à la condition de travail, au respect de la législation, mais aussi à l’image de l’organisation.
Une entreprise engagée dans une démarche de prévention active bénéficie de nombreux avantages :
- Elle limite les coûts liés aux accidents
- Elle améliore son attractivité employeur
- Elle réduit son absentéisme
- Elle montre qu’elle se préoccupe vraiment de la santé de ses salariés
Cette posture participe aussi à l’engagement des entreprises sur des valeurs fortes : responsabilité sociale, sécurité au travail, égalité d’accès à la formation, respect des règles du code de la route.
C’est un message fort, qui peut être relayé dans le rapport RSE, dans les entretiens annuels, ou lors des formations professionnelles. Et qui donne du sens à l’action managériale.
Conclusion : ne pas subir, mais choisir d’agir
Le danger routier au travail est une réalité bien connue, mais encore trop souvent mal anticipée. Pourtant, les solutions existent. Elles sont accessibles, concrètes, et peuvent être mises en œuvre progressivement, même avec des moyens modestes.
Il ne s’agit pas de tout révolutionner. Il s’agit de répondre à une obligation, de respecter la loi sur la sécurité, et surtout, de protéger les travailleurs.
Former, informer, organiser, communiquer : autant d’actions de prévention qui, combinées, permettent de bâtir une culture du risque responsable. Et si une grande entreprise peut déployer un programme national, une TPE peut, elle aussi, organiser une journée sécurité, faire intervenir un formateur, ou envoyer une note d’information ciblée.
C’est en multipliant les gestes simples que l’on évite les drames. Car au bout de chaque trajet, il y a une personne. Et c’est à ce niveau-là que se joue la vraie sécurité.